posté le 26-10-2011 à 21:41:33
Monsieur Martinez
Monsieur Martinez
Les Cadouin # 1
par la Compagnie Teknaï (Île de France)
L’histoire :Quelque part en France, en juillet, à la fin des années 80. Posée sur un parking, une baraque à frites tenue par deux sœurs, pupilles de la nation, Viviane et Suzanne Cadouin. Deux hommes partagent leur morne quotidien : Michaël Pichon, agent de sécurité féru de mécanique, et Joaquim Martinez, enseignant en vacances. Clients réguliers, ils discutent, se disputent, s’arrachent les faveurs des dames qui, elles, négocient, vendent et comptent. Sur ce parking désespérément vide, chacun tente de combler la vacuité de son existence, s’invente une autre vie…
La note d’intention du metteur en scène :
A mi-chemin entre Les Deschiens et la série documentaire Strip-tease, Monsieur Martinez mêle à la vie des « petites gens » une hauteur désespérée propre à la tragédie. La misère solitaire, désertique, des personnages s’accroît à mesure que se révèle la nature de leur lien. Avec Monsieur Martinez, je souhaite traiter avec humour de la solitude, cette solitude qui vous broie alors que vous êtes accompagnés. Les personnages sont quasiment toujours ensemble et tous paraissent totalement isolés.
La pièce est traversée par cinq cauchemars, instants irréels et baroques, qui rompent violemment avec l’horreur de la réalité : les personnages s’y fantasment, s’y cherchent, s’y détruisent un peu plus…
Comme dans tous les spectacles du cycle Les Cadouin, je me suis attardé sur la notion de fait divers : comment des êtres apparemment sans histoire, comment des personnages qui sont loin de chercher à provoquer leur destin basculent dans le fait divers, et le vivent. Alors on se sent coupable de rire, de trop rire, de rire quand il ne faut pas. On sait que l’on rit pour de mauvaises raisons… La drôlerie grince ici de partout.
Voilà une tragédie banale, une tragédie du commun qui ne sait rien de la fatalité, de son sort funeste et qui s’y jette à corps perdu. Le spectateur attend toujours, refusant par le rire d’admettre l’inévitable qu’il pressent…
La musique a une place prépondérante dans ce spectacle. Absente durant la quasi totalité des scènes dites réalistes, elle sous-tend les scènes cauchemardées. Le choix musical s’est porté sur Lachrimae or Seaven Teares de John Dowland, luthiste du XVIe siècle, sept variations sur un même thème. Cinq Lachrimae sont associés aux quatre personnages et à leur cauchemar collectif. Une variation sur un même thème afin de colorer leur solitude et leur espérance de la même teinte : l’absolue tristesse.Quentin Defalt
Pour en savoir encore plusL’avis très perso :
Remplacez cette baraque à frites par un salon de tchat, là, vous devenez les acteurs, vous êtes les sœurs Cadouin, M. Martinez ou Pichon !
Si ça vous fait encore rire, continuez de tchatter, mais bon, je vous aurai avertis.
Le théâtre sait se moquer de nous et, fair-play, nous applaudissons, sublime élégance de savoir passer pour des cons.
La frontière entre le ridicule et le sublime demeure souvent ténue.
Cette pièce montre son cruel, pathétique et drôle.
Joaquim Martinez
P.-S. : cet article avait été envoyé au Boss, le 12 juin dernier ! Allez donc voir également la suite, Les Cadouins #2 : Brita Baumann.
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