Lorsque la langue devient langage
Le texte se prète-il à l'image ou est-ce l'inverse ? Quelle importance quand ils s'imbriquent. Cela étant, je me suis longtemps heurtée aux peintres de mes amis et connaissances, avec cette idée que traces et signes revenaient au langage. Certains défendent la thèse d'une inutilité à relier mots et couleurs. Même moi j'en conviens quelques fois. Quelle est l'intention dans l'acte de laisser une trace ? Qu'elle soit picturale, écrite, cinématographique… Un lien direct à l'existence ? A la réalité ? Palpable ? Matérialisable ? Sans imposer en plus, le caractère esthétique dans la balance. Ni, encore moins, les contingences matérialistes.
Quand on s'interesse à la vie des peintres de notre histoire, on se rend compte que nos contemporains créateurs (et je ne parle volontairement pas d'artistes) sont bien malmenés. Isolés. Dans leur acte de création. Echanger, partager, "brainstormer", tordre, déformer, influer, s'imprégner, s'immerger et entendre, dire, rebondir, répondre, s'impliquer, s'indigner (c'est tendance !), autant de liens qui n'existent plus ou peu. Les fameuses correspondances de Gauguin, Baudelaire, Mozart et les autres… nous enseignent et renseignent parfois plus l' oeuvre elle-même. Je me souviens d'une de ces lectures où Gauguin dont la peinture ne me fait pas vraiment frissonner (ce n'est pas un choix mais un constat personnel) disait à peu près cela : « Je sais que le choix de mes couleurs dérange et contrarie l'Académie. Mais je pressens que ces choix audacieux donneront aux peintres des générations futures, la totale et entière liberté de peindre… » Liberté ! Langue et langage ! Quelle beauté de la pensée. Et si c'était la voie ? Le sens ?
Quelques fois en descendant à l'atelier, j'ai une intention claire. D'autres c'est plus confus. Comme une necessité inexplicable. Ca se brouille rapidement quand les gestes rituels s'ordonnent. Préparer des couleurs, choisir un format, un outil, autant d'actes qui dégagent de l'obsession de la réussite et de l'enjeu. Il me semble que c'est pareil lorsqu'on écrit. Poser le cadre, placer le décor, se lancer. Reprendre, raturer, retirer, soustraire. Et puis y revenir encore.
Lorsque j'ai peint ce triptyque, je suis descendue déterminée. L'intention était évidente. Le choix des couleurs instinctif. De l'outil aussi. Un cadeau d'anniversaire. Comprendre ? Je crois que quelques fois c'est superflu. Mais choisir une langue pour exprimer, ça semble universel.
Zoe-Vie
Commentaires
c'est juste bô
Décidément , pour ma part, j'aime beaucoup tes oeuvres. Moi, en tout cas, cela me parle !